Depuis son annonce, Black Desert Online mise beaucoup sur sa plastique avantageuse pour aguicher le chaland. Mais ce MMORPG coréen a-t-il d’autre ambition que de produire une classieuse démonstration technique ? Maintenant qu’il est enfin sorti dans nos contrées, il est temps de vérifier ce qu’il cache derrière sa belle devanture.
Avant d’attaquer dans le lard, il est de bon ton de rappeler le modèle économique du jeu. Parce que dans le flot incessant de MMO qui déboulent sur le marché, il y a de quoi s’y perdre. Black Desert Online n’est ni un free-to-play ni un MMORPG à abonnement mensuel. Il se classe en quelque sorte à mi-chemin dans cette catégorie des buy-to-play ( à l’instar d’un certain Guild Wars 2). Comprenez par là qu’il vous suffit d’acheter le jeu (30 euros pour la version de base et 50 pour le pack exploreur) pour y faire une petite virée. Raquer mensuellement n’est donc pas un pré requis pour squatter les serveurs. En contrepartie, et parce qu’il faut bien payer l’entretien des serveurs, un item shop plein d’articles qui se troquent contre de l’argent de l’IRL est présent. La bonne nouvelle, c’est qu’il est totalement optionnel. Il se limite à des montures ou des objets cosmétiques qui octroient divers bonus d’xp (et dont les prix frôlent l’arnaque). Rien qui ne changera fondamentalement la donne en PvE ou PvP niveau puissance de frappe. Soyez donc rassurés, on a vu des jeux avec abonnement payant moins charitables que ça.
L’inconnue dans cette histoire, c’est la méthode de mise à jour du jeu. Comme il n’y a pas d’abonnement, est-ce qu’on aura droit à des petits ajouts réguliers et gratuits ou, au contraire, il faudra tabler sur des grosses extensions payantes ? A l’heure actuelle, si on sait que quelques nouvelles classes arriveront régulièrement et gratuitement, on n’en sait pas plus.
La naissance d’un héros
Avant de naître sur un serveur, il faut passer par l’inévitable formalité administrative inhérente à tout MMO qui consiste à valider ses premiers choix de vies. Le joueur devra ainsi opter pour une classe dans un premier temps. Pour le moment, elles sont variées dans leurs approches mais d’un classicisme un brin décevant : guerrier, mage, archère, … Le truc qui fait surtout tiquer, c’est que les classes sont race et gender-lock. Oui, il n’est pas possible de choisir son sexe ou sa race. Si vous jouez Berserker, ça sera un mâle et puis c’est tout. Seul le magicien a droit à sa déclinaison féminine. Pourquoi et comment en est-on arrivé là ? Aucune idée…
Comme c’en est devenu la mode ces dernières années, le développeur a aussi décidé de jeter la sainte trinité aux oubliettes. Si le guerrier et la valkyrie peuvent être assimilés à des pseudo-tanks (ne me frappez pas les puristes), il n’y a aucun réel soigneur. Pour récupérer ses points de vie, on se contente donc de spammer son raccourci vers les potions (ou d’éviter les coups si vous êtes plus skillés).
Une fois ce premier choix opéré, la première claque visuelle pop tout droit dans nos rétines. Les personnages que l’on peut créer sont vraiment jolis et détaillés. Enfin, jolis dans le sens graphique du terme. Parce que rien ne vous empêche de créer un avatar tout moche. L’outil de création de personnage est largement plus complet et permissif que ce qui se fait chez la concurrence. Bien fichu et hyper profond, il permet de donner vie à peu près tout et n’importe quoi. Chaque détail corporel, des orteils aux oreilles, est paramétrable à coup de réglette. C’est bien simple, avec un peu de patience et de doigté, il est possible de se sculpter à peu près tout et n’importe quoi.
La seconde claque graphique n’est pas loin et survient juste quand le monde du jeu s’ouvre à nos mirettes. Il n’y a pas à tortiller : les décors sont clairement à l’avenant. Certes, ce sont des environnements classico-classiques-déjà-vus sauce heroic fantasy et un peu ternes, mais ils sont bien mis en valeur. C’est propre, ça affiche loin et les animations sont soignées. L’immersion est par ailleurs renforcée par la myriade de PNJ peuplant les villes. De mémoire de joueur de MMO, je n’ai pas souvenir de ville grouillant à ce point de personnages non joueurs. La plupart bougent et donnent l’impression de vaquer à leurs occupations ce qui renforce l’aspect vivant des bourgs explorés. Ajoutez à cela un immense monde ouvert en streaming non instancié et sans aucun temps de chargement, même pour entrer dans une bâtisse, et vous comprendrez que l’exploit visuel et technique est bel et bien dans la place malgré un poping tardif assez prononcé. Et puis il y a la surcouche de petits détails qui confèrent un chouette cachet au jeu. Comme les armures qui se salissent et s’abiment en se dégradant. Ou encore les cuirasses ennemies qui se couvrent de sang et se fissurent à mesure que vous les rouez de coups. Bon, dans un souci de complétude dans cet aparté techniquo-graphique, soulignons tout de même deux choses. La première, c’est que, comme pour tout MMO, toutes les zones ne sont pas égales et certaines sont plus lambdas que d’autres. La seconde, c’est que pour tourner en ultra à du 60 images constants en ville, il faut posséder une configuration bien musclée. Avec une GTX 970 et un i5 pas trop dégueu, les 60 FPS sont relativement constants mais dès que je baladais mon museau dans une ville densément peuplée, ça chutaite à du 30 voir du 20 FPS. Il est donc vivement recommandé de bien étudier les paramètres graphiques pour trouver les réglages qui siéent à votre PC.
Action. Baston
Le système de combat de Black Desert Online suit cette mouvance actuelle dans laquelle les combats MMOesques sont de plus en plus dynamiques et interactifs. Ce qui ne l’empêche pas d’y ajouter quelques touches d’originalité. Le système pourrait être qualifié de « libre des guiboles sans ciblage automatique ». A la façon d’un FPS, un petit réticule doit être aligné sur les monstres avant que vous lâchiez la purée. Ça requiert un peu de skillshot, car si vous visez à côté et bien… ça passe à côté (et bim, mange toi ton cooldown). Là où c’est original, c’est dans la façon de déclencher ses compétences. Si l’inévitable barre de raccourci est dans la place, il est conseillé de lancer ses compétences en effectuant des combos à base de touches de clavier et de clics de souris ( shift + clique gauche, S + F, Z + clique droit, etc.). Dans la pratique, c’est assez semblable aux combos d’un jeu de baston (en moins complexe) et in fine, la barre de compétences ne sert que pour les potions et quelques autres compétences à reuse longuet. Un petit temps d’adaptation et de mémorisation de toutes ces combinaisons est cependant nécessaire avant de commencer à réellement s’amuser. Mais une fois que c’est dans la caboche, c’est parti pour de jolies cabrioles martiales en tapant du mob par pack de 12 tout en abusant de l’esquive active. C’est nerveux, très fun et ça oblige à rester constamment sur le qui-vive pendant le farming. Si vous aimez le gameplay action – qui lorgne carrément du côté du beat’em all par moment – et qui est assez loin du MMO statique de papa, ça risque bien d’être votre came.
Pour mettre la baston en musique, Black Desert Online opte pour le choix d’offrir régulièrement des points de compétences à distribuer dans un bon gros catalogue de skills répartis en arbres. Il y en a une palanquée à débloquer et pour tous les choper, de très (très) longues séances de farming seront nécessaires. A défaut de tout posséder, se creuser les méninges ou suivre des tutos sont des options toutes aussi viables pour se builder correctement. Résumer BDO à son système de combat serait bien réducteur, car il a bien plus à offrir. Comme par exemple son monde persistant qui regorge d’activités.
Buffet libre à volonté
Entre deux phases de grinding, amusant mais un peu décérébré, Black Desert Online ne manque pas d’autres distractions sur lesquelles se reporter. Il y a d’abord votre quête personnelle, sorte d’histoire fil-rouge vous guidant à travers la map. C’est sympa sans pour autant être mémorable. Sinon, vous pourrez aider les NPC du coin. Ils ont toujours besoin d’un coup de paluche ou d’un objet particulier. Chose plutôt surprenante, les quêtes ne donnent pas d’xp pour vos niveaux. A la place, ce sont des points de contribution qui sont offerts. Ces points servent, notamment, à s’octroyer les faveurs des locaux ou à louer une maison. Une maison qu’il faudra ensuite décorer à l’aide d’une interface façon Sims. C’est complet et son petit chez soi peut être pimpé avec des meubles/lits/sols qu’il faudra crafter ou acheter. L’artisanat propose d’ailleurs tout plein de variantes (cuisine, alchimie, travail du bois, pêche, …) et est accessible à toutes les classes, sans prérequis. Pour le pratiquer, il suffit de sélectionner l’action parmi celles disponibles en fonction des matériaux que vous avez sur vous. Si vous devenez un bon artisan, vous pourrez même faire de la maille en revendant vos créations (ou vous fabriquez votre propre bateau, c’est pas la classe ça ?). Par contre, il faut des matières premières avant de crafter. C’est pourquoi, on passe beaucoup de temps avec son âne/cheval à récolter du matos pour aller le revendre plus loin. On coupe des arbres, on dépèce des loups, ou on pêche beaucoup (on peut même pêcher en mode automatique en étant AFK).
Vous pouvez aussi engager des NPC pour vous aider dans vos besognes. Comme on ne peut pas se téléporter in-game (ok, ça renforce l’immersion, mais on a du mal à se dépêtrer de cet assistanat auquel on a été habitué), on passe beaucoup de temps à gambader d’un point A à un point B. Externaliser ses tâches est donc super utile pour optimiser son temps de jeu. A côté de tout ça, on a aussi l’inévitable PvP, réservé aux high levels et surtout axé guilde contre guilde et prise de point stratégique. Bref, il y a vraiment une profusion d’occupations toutes intéressantes en marge du grind pour le leveling.
Tout n’est cependant pas parfait dans Black Desert Online. Mais heureusement, ces soucis sont minimes. On peut, par exemple, pester contre une traduction anglaise pas toujours top et incomplète (textes encore en anglais par moment), contre une interface brouillonne à première vue (mais paramétrable sur de nombreux points) ou contre un réel manque de skin sur les armures. Mais surtout, les deux gros problèmes à souligner, sont qu’il y a, tout d’abord, un véritable manque d’explications sur les mécaniques de jeu. Du coup, on est souvent perdu devant la densité du jeu et le rythme d’apprentissage dépend grandement de votre expérience dans le domaine. Le second point noir, c’est le manque d’activités en groupe et de end game PVE.
Il y aurait encore de quoi écrire des pages et des pages sur Black Desert Online. Détailler le crafting, le système d’upgrade de son équipement, les géopoints, les différentes barres d’xp, la capture de dada, etc. Mais ce test est déjà assez long et je suis là pour vous donner un avis, pas pour pondre un wiki. Et, comme vous l’aurez compris (si j’ai bien fait mon job) : je l’aime bien ce MMO malgré ces quelques petits défauts.
Conclusion
Black Desert Online est riche et varié. S’il ne se dépêtre pas tout à fait des clichés du MMO coréen – malgré quelques belles idées comme ses combats dynamiques -, il est un titre solide à la réalisation soignée. Soyez par contre conscient que sa densité et son obscurantisme pourraient rebuter les moins aventureux. Mais pour peu que vous aimiez les mondes persistants et que vous n’avez pas peur de farfouiller par vous-même pour découvrir des choses, vous ne devriez pas vous ennuyer en vous lançant dans cette aventure. Reste à voir comment évoluera le jeu au gré des mises à jour. Mais à cet instant T, vous dégusterez un bon gros MMORPG copieux.
Black Desert Online
- Développeurs : Pearl Abyss
- Type : MMORPG coréen
- Support : PC
- Sortie : 03 mars 2016
Y’a bon!
- Système de combat dynamique
- Plein d’activités
- Techniquement réussi
- Immense monde ouvert sans chargement
- Pas d’abonnement
Beuargh!
- Interface brouillonne
- Obscur dans ses mécaniques
- C’est du MMO coréen, on farm beaucoup
- Manque d’activité de groupe