Si comme moi vous vous êtes perdus dans les terres désolées de Death Stranding lors de sa sortie (sur PS4, mais récemment sur PC également), vous n’avez pu avoir que deux réactions. Soit un rejet presque total dû aux personnages clichés, à la narration très évasive et au monde intégralement vide. Soit vous avez pris du plaisir à parcourir ces États-Unis imaginaires à la poursuite d’une princesse qui se trouve toujours dans un autre château, au son lancinant de Low Row en prenant soin de prendre les chemins les plus escarpés.

Le livre de Antony Fournier paru chez Third Editions s’adresse à tout le monde. Si les seconds y verront une plongée passionnante dans l’univers imaginé par Kojima, riche en symbolique et en référence, les premiers y trouveront beaucoup de justification à des éléments qu’on pourrait qualifier d’absurde au premier abord. Comment un créateur aussi prolifique et pertinent en vient à nommer ses personnages juste par leur fonction ? Loin d’être un choix par défaut, on apprend par exemple dans cet ouvrage qu’il y a une raison et une référence bien réelle derrière.

Comprendre les choix opérés dans Death Stranding implique de connaître un peu mieux son auteur, Hideo Kojima, et son travail. Lui qui jusque-là avait été lié par une série iconique chez un éditeur, le voilà libre comme l’air d’explorer les thématiques qu’il souhaite de la manière qu’il le souhaite. On laisse rarement autant de liberté à un créateur, car cela coûte cher (on se souvient que c’est l’une des raison qui a poussé Kojima hors de Konami), mais quand le risque est pris, il faut savoir accepter de tomber dans une production qui sort du cadre. Et assurément, c’est le cas de Death Stranding.

J’ai très peur que cette critique devienne un résumé du livre, ce que je me refuse à faire depuis le début de ces fiches de lecture. Kojima a toujours dû composer avec les limitations techniques et financières (ce qui a mené au à la direction Infiltration de sa saga Metal Gear), mais aussi avec ses propres idées. Si l’homme imagine toujours les histoires et les contextes les plus fous, mais toujours ultra-documentés, il doit toujours ramener tout cela à un projet final et bien concret. Des limites qui le brident, mais qui sont autant de moteur pour l’aider à trouver des parades, bien que parfois, ça n’ait pas fonctionné (on se souvient du dernier épisode de Metal Gear par exemple). Mais le livre revient aussi sur les autres jeux du créateur, rappelant à chacun que toutes ses productions avaient quelque chose de plus qui les différenciaient des autres productions, à l’image de Boktai, cartouche devant se régénérer grâce au capteur solaire, à Psycho Mantis qui pouvait lire nos mouvements de manette et notre carte mémoire, ou encore la nourriture périssable de MGS3 dépendante de l’horloge interne. On se souvient que celle-ci pouvait même être mise à contribution pour vaincre un boss, le laissant simplement mourir de vieillesse !

Dans le cadre de Death Stranding, il est question de liens. Ceux qui nous unissent en tant qu’être humains, mais aussi en tant que société ou famille. Le concept est utilisé jusqu’au bout, puisque Death Stranding est une expérience éminemment connectée où tous les joueurs tissent également des liens entre eux, à coup de “Like”, d’encouragements ou de matériel. L’auteur disait vouloir travailler sur le concept de “corde et de bâton”, des objets présents depuis la nuit des temps, mais dont l’un d’eux avait été bien trop oublié au profit de l’autre. La Corde est ce qui rassemble et protège, mais aussi attache et pend. La corde est ici au centre de tout, du cordon ombilical qui retient l’enfant à sa mère à celui qui lie l’âme au corps en passant par les liens familiaux indéfectibles, les connexions au réseau chiral ou ces câbles qui attachent Sam à Lou. Le livre explique ici comment l’auteur a travailler à ne pas employer « le bâton » mais juste « la corde » sur chaque aspect.

Les liens qui sont aussi à l’origine du projet, puisque sans les liens tissés avec Norman Reedus et Guillermo del Toro pour le projet avorté “Silent Hills”, Death Stranding et Kojima Productions ne seraient sans doute pas de ce monde.

Comme toujours, la seconde partie est consacrée à l’histoire complète du jeu. Celle que vous avez pu suivre en compagnie de Sam Porter Bridges, mais pas seulement, puisque cette fois, elle vous sera contée de manière chronologique ! Une façon de faire qui détruit totalement l’intrigue pour les nouveaux venus – puisque cette dernière est le moteur même de notre progression – mais qui est indispensable pour comprendre les tenants et aboutissants de l’histoire, des liens entre les personnages et de la logique même qui régit le monde du jeu.

Un livre que je conseille à tout ceux qui veulent comprendre comment un univers se crée, comment travaille Hideo Kojima et qui veulent en apprendre plus sur ses multiples références et réflexions, qui peuvent donner un nouvel éclairage sur des choix qui ont pur rebuter les joueurs lors de la sortie de Death Stranding.

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Titiks

Quadra assumé, daron de 3 apprenties gameuses, fan de tout ce qui est capable de raconter une bonne histoire. Touche-à-tout, mais surtout de bonnes aventures qui savent surprendre, et dévoué à l'univers console depuis que Sega était plus fort que tout, vous me verrez bien plus souvent connecté à la nuit tombée #2AMFather.

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