Obligatoires ou facultatifs, ils sont présents dans presque tous les jeux et ce, depuis des années. Pourtant cela na pas toujours été le cas et il fut un temps où les tutoriaux n’existaient pas.
Lorsque vous jouez à un jeu pour la première fois, vous savez que vous allez passer irrémédiablement (ou presque) par la phase de tutorial, cette sorte d’introduction au jeu et à son gameplay qui doit, en théorie, vous permettre d’acquérir les bases pour progresser. Mais les plus vieux se souviennent qu’il fut un temps où les tutoriaux n’existaient pas ou bien étaient réservés à certaines catégories de jeux bien précis, comme les jeux de stratégie ou de gestion.
En effet, pas de tutorial dans un Castlevania sur NES ou un Sonic The Hedgehog sur Megadrive, le joueur est directement plongé au coeur du jeu, sans qu’on lui prenne la main. Rien de bien étrange car il faut se rendre compte que les jeux d’antan, aussi excellents soient-ils, étaient moins complexes que ceux d’aujourdhui, tout du moins en ce qui concerne la prise en main. Prenons Super Mario Bros sur Nes par exemple : un gameplay ultrasimple, évident et intuitif. On avance, on court, on saute et l’affaire est réglée. Pas besoin de passer par 30 minutes de tutorial avec une petite voix-off pour comprendre comment le jeu fonctionne. Car il existe d’autres solutions.
Si on y regarde de plus près, le premier level de Super Mario Bros est, en lui-même, une sorte de tutorial. Imaginez quelqu’un qui n’a jamais joué à Super Mario Bros, ni même à un jeu vidéo, et que ce dernier lance le jeu. Le premier level contient tout ce dont il a besoin pour apprendre les bases du gameplay : le premier tableau lui apprendra quil faut toujours avancer vers la droite, que les cubes marqués d’un ? recèlent des bonus (ou des pièces), qu’il peut sauter sur les ennemis et qu’il peut mourir s’il les touche autrement. Le deuxième tableau le confrontera avec les ravins : d’abord un minuscule puis de plus en plus grands. Le level design devient un outil d’apprentissage. A ce titre, les Megaman ont toujours été de très bons élèves en la matière (l’excellent Egoraptor en parle d’ailleurs dans l’une de ses vidéos). Bref, le joueur apprend en douceur mais il le fait par lui-même, sans qu’on lui prenne forcément la main ou lui mette les points sur les i.
Et c’est là toute la différence avec les tutoriaux actuels qui, eux, prennent la main du joueur (sans forcément lui demander son avis) et le font passer à côté de la découverte pure du jeu. Une petite voix-off vous dit quoi faire, sur quelle touche appuyer et si vous exécutez bien les ordres, vous recevrez une pluie de compliments (ou mieux, des trophées). Car il ne faut pas que les premiers instants de jeux se déroulent mal, il faut que le joueur soit en confiance. Les éditeurs et surtout les marketeux le savent bien, un joueur se fait très vite une opinion du jeu qu’il a entre les mains, c’est une question de minutes, voire parfois de secondes. Si ces dernières se déroulent mal, le joueur n’aura pas envie de progresser et lâchera l’affaire. Alors on le babysitte, on le materne. Mais pas trop car si il y a bien une chose que le gamer n’aime pas, c’est qu’on le prenne pour un abruti. Et quand on vous félicite ou vous octroie un trophée pour avoir trouvé la touche saut, il y a de quoi se poser des questions.
Pourtant il existe encore des titres qui osent se passer de tutorial et qui poussent littéralement le joueur en plein dans le jeu. On pensera inévitablement à l’excellent Journey qui mise justement sur ce manque de repère pour immerger le joueur dans son univers si particulier. Ou Minecraft qui compte sur la curiosité des gamers pour tester et découvrir comment fonctionne l’univers du jeu. Car c’est bien de découverte, d’expérimentation que l’on parle. « Tiens, ça fait quoi si j’appuie sur ça ?», « Et si je tente ça, qu’est-ce que ça donne ? », autant de phrases qui incarnent à elles seules ce plaisir simple de la découverte, moteur essentiel dans le processus de jeu. Le tutorial, avec sa fonction (trop) explicite, tue cette magie du mystère, cette envie d’exploration composée d’essais à tâtons et d’échecs, qui est pourtant essentielle au joueur. Une étude américaine sur de jeunes enfants s’était penché sur le sujet. Un jouet complexe qui permet plusieurs choses (couiner, s’agiter, jouer de la musique etc) est présenté a des enfants. A certains d’entre eux, le scientifique montre comment faire couiner le jouet. A d’autres, il fait mine de découvrir le jouet en même temps qu’eux, sans rien expliquer. Résultat: les premiers se cantonneront à la seule fonction qu’on leur a exposé tandis que les autres iront à tâtons et exploreront toutes les possibilités du jouet. Comme quoi, même apprendre à un prix.
Néanmoins, nous ne sommes pas là pour militer contre les tutoriaux. Ils ont leurs avantages et permettent à certains joueurs, parfois novices, de saisir certaines bases afin de profiter du jeu devant lequel ils se trouvent. Car le monde du jeu vidéo s’ouvre et attirent de nouveaux profils de joueurs : casuals, novices, hardcore gamers ou nostalgiques, autant de types de gamers qui ne possèdent pas forcément les mêmes bases, les mêmes réflexes. Ce qui semblera aller de soi pour l’un ne le sera pas toujours pour l’autre. Et c’est là que le tutorial intervient pour combler cet écart. Mais comme à chaque fois dans le monde du jeu vidéo (ou dans le monde tout court), tout est question d’équilibre, un équilibre parfois difficile à atteindre entre absence totale d’indications et tutoriaux débilitants. Peut-être devrons-nous encore attendre un peu pour trouver ce tutorial parfait qui contentera novices et vieux gamers?
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