L’art de garder le mystère lors d’une annonce de jeu est une arme à double tranchant.
Soit vous y êtes totalement hermétiques, soit vous êtes piqués dans votre curiosité et vous attendez impatiemment d’enfin pouvoir démêler ce sac de nœuds.
Aussi, comme nous ne sommes pas que des êtres binaires, il y a la possibilité qu’un hermétisme d’origine se transforme au fil des mois, des vidéos ou des articles en une attention toute particulière et une curiosité au niveau maximal.
C’est exactement ce que j’ai vécu avec Control de Remedy.
Au tout début, le seul véritable point sur lequel je m’accrochais était ma connaissance des créations passées du développeur finlandais.
Une confiance presque aveugle dans un art du storytelling et de l’onirisme de ses univers.
Les making of toujours visibles sur Youtube ont bien mieux réussi que tous les trailers à me faire espérer une oeuvre singulière, enfermée dans un écrin de TPS aventure qui de loin pourrait sembler lambda.
Grand bien m’en prit d’espérer ce titre à part, ce titre de cœur d’un studio prêt à prendre le risque de sortir des sentiers battus de la linéarité.
Car force est de constater que Control est un véritable joyau.
Sens dessus dessous et certainement pas déçu
Pour vous replacer un peu le tout, Control vous proposera d’incarner Jesse Faden, une jeune femme devenue tout récemment la nouvelle directrice du Federal Bureau of Control, une agence secrète située à New York dans “l’ancienne maison”, “The Oldest House” en version originale.
Cet endroit, juste avant votre arrivée, se retrouve en proie à une menace venant d’ailleurs (le Hiss) et c’est à vous qu’incombe la lourde charge de devoir remettre de l’ordre dans tout ça.
Je me réserve de vous dévoiler quoi que ce soit d’autre de l’histoire, car le spoil c’est mal et surtout, SURTOUT, Control est un jeu à vivre.
Si Control a bien dans son ADN des traces flagrantes de TPS (une spécialité de Remedy), en y regardant de plus près on y voit clairement des envies de construction se rapprochant du concept de “Metroïdvania”.
Le jeu se veut ouvert et vous demandera de visiter et revisiter certains endroits au fur et à mesure de l’aventure afin d’en découvrir de nouveaux éléments, d’en débloquer d’autres et surtout de faire avancer une histoire diablement complexe et prenante.
Il vous arrivera souvent de vous sentir perdu, que ce soit au niveau de l’histoire ou de ce voyage au beau milieu d’un dédale de pièces et d’étages : un chemin tortueux entouré de constructions bluffantes se faisant plaisir avec un mélange de déconstructivisme et de brutalisme dans son architecture.
Un état de fait que l’on accepte finalement très vite. Tout comme l’héroïne, vous débarquez, vous devez comprendre ce qui vous arrive, apprendre à connaître un bâtiment empli de mystères, alors qu’il se retrouve mis sens dessus dessous par cette entité manipulatrice et dangereuse.
I’ve got the power
Evidemment, je vous dis qu’il s’agit d’un TPS dans sa substantifique moëlle, mais je ne vous ai pas encore donné mon ressenti sur ses phases de gunfights. Quel malotru je fais.
Au beau milieu de cet univers intriguant, vous aurez droit à bon nombre de combats, qui pour la plupart seront haletants et vous feront souvent craindre pour votre peau. Qu’il s’agisse d’un Boss ou non.
D’un point vue maniabilité, cela répond au doigt et à l’oeil et on prendra un véritable plaisir à découvrir et utiliser de nouveaux pouvoirs (la télékinésie qui fera valdinguer des objets et plus encore, un pouvoir de protection bouclier, de la lévitation, des corps à corps puissants, …), ainsi que des modifications pour vos armes et vos propres capacités (tirs plus puissants, plus rapides, meilleure santé, nouvelles capacités et pouvoirs, …).
Les ennemis sont voraces, parfois imprévisibles et fourbes, il vous faudra apprendre à les reconnaître et à éviter par exemple de tirer plusieurs fois sur le genre qui explose au contact. Par exemple, hein, j’ai un ami qui…
On s’amusera aussi de voir comment la physique fonctionne pendant les combats, comment le champ de bataille prend vie par une foule de petits détails. Cela va des extincteurs qui, en se fracassant contre un mur, recouvre celui-ci de neige carbonique en passant par les piliers qui se désintègrent sous les balles des armes à feu, ou encore des éléments du décor qui virevoltent. Personnellement j’adorais voir une poubelle, que j’essayais de contrôler avec le pouvoir de télékinésie, assommer un ennemi se rapprochant de moi.
Il n’y a pas de petits plaisirs, savez-vous.
C’est bien sur ce côté là que Control m’inquiétait le plus, pour être totalement franc avec vous. Mais, malgré quelques petites errances et phases à la limite du frustrant, l’aspect combat du titre est pour moi une véritable réussite qui m’aura fait principalement suer pour de bonnes raisons.
Il y a du Lynch dans l’air
Ce que je retiens réellement du titre de Remedy, c’est bien son story telling et son level design qui s’amusent avec la notion de réalité.
Il ne se passe pas une seule seconde et ce dès les toutes premières, sans que l’on se demande ce qui se passe autour de nous. Il vous arrivera de ne pas comprendre certaines choses tout de suite, mais elles tendront à devenir plus claires (en un sens) avec le temps et la progression du jeu.
Ceci dit, il reste des éléments qui n’auront d’explications que via votre propre interprétation et ce que ce soit dans la trame principale ou dans l’histoire de cette “Oldest House” que vous pourrez découvrir via un grand nombre de documents et vidéos toutes plus intéressants les unes que les autres.
J’ai ressenti des moments Lynchien, des rappels de Twin Peaks très souvent. Ce ne sont certainement pas les seules références, mais à mon humble avis, ce sont celles qui pourraient revenir le plus souvent chez le joueur.
Il faut accepter que tout n’ait pas un sens comme on l’entend dans le sens ordinaire du terme.
De toute façon Control ne vous laissera pas vraiment le choix. Tout est cohérent dans son incohérence.
La mise en scène, en lumière et la direction artistique sont là pour tout soutenir.
J’avoue m’être surpris à réfléchir d’une autre façon, comme si j’avais intégré une partie de la logique de l’univers du jeu. Au point que si certaines énigmes ont pu me faire me gratter la tête au début, elles ont fini par me faire accepter une logique de conception tout en réussissant à me donner du fil à retordre et à me surprendre via quelques contre-pieds.
Et pourtant, malgré tout cela, à aucun moment je ne sentais arriver ce qui risquait de m’arriver à chaque chapitre. Jamais je n’ai même réussi à le deviner.
A chaque nouvelle mission principale, chaque nouvel endroit découvert, j’étais entre admiration et incompréhension. Parfois même un peu de peur.
Et pourtant j’en ai demandé et re-demandé encore et encore jusqu’au bout.
Conclusion
Avec sa dernière création, le studio finlandais signe ici un véritable TPS d’auteur, un voyage vers l’inconnu, le magnifique ou encore l’effrayant. Une aventure soutenue de bout en bout par une technique au service de sa direction artistique et habillée d’une b.o discrète et d’effets sonores qui ne dénotent jamais.
Control est une véritable claque de prise de risque. Un jeu plein de tout ce qu’est Remedy.
Vous pouvez compter sur 15 à 20h de jeu pour un voyage dont je ne suis revenu pas totalement indemne et qui aura su me marquer par sa construction et son intention, au-delà de toute considération technique ou de gameplay.
Control
- Développeurs Remedy Entertainment
- Type Aventure
- Support PS4, PC, Xbox One
- Sortie 27 Août 2019