Voilà un titre qui sonnerait presque « clicbait » tant il semble nager bêtement à contre-courant de l’engouement actuel de l’industrie et des joueurs. Pourtant la question est à mon sens légitime, et nous allons voir ensemble pourquoi.
L’industrie du jeu vidéo, c’est un fait, a connu une ascension impressionnante ces dernières années, se voyant même octroyer le si convoité mais si bancal titre de première industrie culturelle. De fait, l’industrie cherche actuellement ses propres moyens d’évolution, tant dans le but d’attirer un public varié que pour se diversifier et toucher du doigt de nouveaux horizons ludiques. Et comment lui en vouloir ?
C’est en ce sens que s’inscrit la réalité virtuelle, lointain fantasme bidouillo-technologique quelque peu “ringard” des années 90 (cf le film Le Cobaye) mais considéré aujourd’hui comme l’avenir du jeu vidéo. C’est la société Oculus qui s’est imposée en précurseur dans ce domaine, en dévoilant dès 2012 les premières images de l’Oculus Rift, un casque de réalité virtuelle qui sera bientôt disponible au grand public (vraisemblablement en 2016, sauf problème majeur). La promesse de l’Oculus Rift est alléchante: il s’agit d’un casque que l’on porte sur le visage (sur la zone oculaire précisément) et qui permettra au joueur de s’immerger totalement dans son jeu, en s’appropriant les mouvements faciaux de son avatar virtuel et en interagissant à travers lui dans le jeu. La réalité virtuelle se base ainsi sur une promesse, celle d’une immersion incroyable, jamais atteinte dans ce médium qu’est le jeu vidéo. À l’aide de premières démos techniquement impressionnantes, les constructeurs et développeurs ont fait briller les yeux des joueurs en montrant de nouvelles idées de jeu basées sur la présence virtuelle du joueur dans le jeu.
Pour autant, le jeu vidéo n’est pas qu’une affaire d’immersion. Si l’industrie a tant pu se développer, c’est précisément parce qu’elle a su se renouveler et proposer toujours plus d’expériences de jeu originales et différentes. Et en ce sens les casques de réalité virtuelle nous promettent de singulières expériences immersives certes, mais quid des expériences de jeu ? En termes de game design, Oculus Rift & consorts ne permettent par essence que très peu de possibilités de gameplay. Le joueur s’enferme dans des jeux à la première personne, sans que l’on puisse vraiment imaginer d’autres usages vidéoludiques des casques de réalité virtuelle. Il sera en plus nécessaire d’adapter les usages afin de limiter les problèmes et malaises (au niveau notamment de la cohérence entre perception visuelle et proprioception, c’est-à-dire la cohérence entre ce que voit le cerveau et la perception qu’il a des membres du corps et de leur position dans l’espace). Plus loin encore, Microsoft a parlé lors de l’E3 2015 de réalité augmentée. Si l’idée est prometteuse, elle impose de redéfinir l’espace de jeu, et par extension les façons de jouer et les conventions de game design actuelles. Si des jeux comme EyeToy ou Wii Sports ont semblé réinventer le jeu vidéo durant quelques mois/années, l’Histoire avec un grand H montre bien qu’il ne s’agissait finalement que d’un cycle parmi tant d’autres dans l’industrie. Et c’est précisément ce qui peut arriver à la réalité virtuelle…
En voulant donner un second souffle à une industrie du jeu vidéo en panne de créativité, la réalité virtuelle et la réalité augmentée risquent donc de bouleverser de nombreux codes, trop peut-être pour cette industrie encore jeune. Finalement, en dépit de l’effervescence actuelle autour de ce domaine qui ne doit pas altérer notre vision de la chose, la réalité virtuelle est-elle vraiment compatible avec le jeu vidéo ? On peut imaginer que Valve, Oculus et consorts se penchent déjà sur la question, mais celle-ci mérite d’être posée. La réalité virtuelle va bluffer les joueurs, certes, mais pour pour un temps limité. À moins que nos amis développeurs aient déjà des idées bien précises en tête, mais lesquelles ?
Pour avoir testé, c’est bien, c’est innovant mais tu t’en lasses vite. La RV est novateur mais elle a encore beaucoup d’effort à faire, notamment niveau design (je n’ai jamais réellement été convaincu)