Après Bound By Flame, changement de registre. Avec The Technomancer, les français de Spiders reviennent sur Mars après Mars : War Logs en étoffant leur univers. Au programme : une planète rouge coupée de la Terre depuis trop longtemps, des mutants, une police secrète un peu trop puissante, des consortiums s’affrontant pour le contrôle de l’eau et les mystérieux Technomants…

Abondance

Il est plutôt compliqué de parler correctement des jeux Spiders, mais je pense qu’on pourrait résumer en disant “jamais à la hauteur de leurs ambitions”. Cependant, il serait erroné de conclure que ce sont de mauvais titres pour autant. Ceux que je nommerais “les petits Bioware” voient grand, mais sans doute trop grand pour un studio de 20 personnes aux moyens plus limités que leurs homologues canadiens. Alors, avant de parler de ce qui déraille dans The Technomancer, attardons-nous un peu sur les idées brillantes et l’excellent travail fourni. Parce que tirer sur l’ambulance c’est aussi oublier tout le labeur d’une équipe et  toutes les qualités qui découlent de passionnés.

Peu d'options de personnalisation, mais au final ça suffit
Peu d’options de personnalisation mais, au final, ça suffit

Tout d’abord, l’univers. Certes, Mars est moche, rouge, rouillée, sombre et désertique. Mais c’est aussi un univers fouillé et méticuleusement dépeint, de façon presque réaliste. Et c’est sans doute ce qui donne le cachet austère des production Spiders. Rien n’est exubérant, ou vaguement épique. Tout est à échelle humaine, jusqu’à votre quête et dans le traitement que vous réservez à vos ennemis. Les humains ne sont que peu nombreux sur Mars et livrent tous les jours une bataille pour leur survie. Très tôt, votre Mentor vous enseigne que vous pouvez éliminer vos ennemis humains pour récupérer leur Sérum (une denrée servant autant de monnaie que d’ingrédient pour la fabrication ou l’amélioration d’équipement) ou les laisser inconscients et simplement leur faire les poches. La vie humaine étant précieuse, tuer influera sur votre Karma, mais le jeu vous laisse le choix. Toujours.

Chaque cité propose des environnements propres et originaux... mais un mauvais Level Design
Chaque cité propose des environnements propres et originaux… mais un mauvais Level Design

Tuer ou laisser vivre ? Mentir à vos supérieurs au sujet de l’issue d’une mission ? Choisir une voie pacifique à la résolution d’un conflit parce que votre commanditaire – dont vous avez besoin – agit contre vos principes ? Tout cela est possible et confère au jeu une certaine richesse dans son déroulement, si tant est que vous soyez prêt à en subir les conséquences. Les choses finissent bien souvent par se savoir et il vous faudra alors faire preuve de persuasion – ou de sincérité – pour vous expliquer et conserver le soutien de l’une ou l’autre faction.

L'introduction était bien mise en scène, malheureusement, la suite est plus austère
L’introduction était bien mise en scène ; malheureusement, la suite est plus austère

Au-delà de ça, l’univers de The Technomancer est admirablement bien construit. On ressent la détresse d’une société qui a dû se débrouiller seule alors qu’elle n’y était pas forcément préparée. En découlent une gestion des mutants (que le soleil a irradié) semblable à l’esclavagisme des pires heures de notre histoire, des sociétés s’affrontant pour le contrôle de la seule ressource réellement indispensable et des jeux de pouvoir incessants. La société a même rebaptisé ses enfants en fonction de leur utilité. Ainsi, les noms de famille ne représentent plus que la notion d’utilité de ses membres : Seeker, Reacher… Mancer. Des villes se sont organisées, chacune avec ses coutumes, ses commerçants, sa politique… et ses services secrets nommés ici ASC, au cœur de bien des manigances (vous les reconnaîtrez aisément : des hommes en noir bien lugubres). Seulement cette histoire et cette richesse ne sont accessibles qu’à ceux qui désirent creuser un peu, au détour d’une conversation dans la rue ou dans les quêtes annexes.

Technomants

Déjà aperçu dans Mars War Logs, la caste des Technomants dont vous faites partie constitue une sorte de force d’élite au terrible secret, souvent manipulée par une force ou l’autre dans les jeux politiques de la planète. Contrôlant le pouvoir de l’électricité, ils sont considérés comme des guerriers accomplis et surpuissants. La jeune recrue, Zach Mancer, que vous contrôler va justement passer son test final d’aptitude. L’occasion de se familiariser avec le système de combat très libre que proposent les développeurs. Ce ne sont en effet pas moins de 3 styles de combats qui vous sont donnés en début d’aventure, en plus de vos pouvoirs de Technomant. Un style au bâton, acrobatique et centré sur les dégâts de zone, un style plus agile façon roublard, doté d’un pistolet et de dagues, et un style plus destructeur et plus lent en la personne du gardien, armé d’une massue et d’un bouclier. Libre à vous de jongler entre ces styles ou d’en perfectionner un seul, en sachant que vous pouvez passer d’un style à l’autre en plein combat – même si ceci s’avère assez dangereux étant donné le temps que cela prend en pleine mêlée. Additionnés à vos capacités électriques très utiles vous permettant d’électrifier vos armes et de créer des boucliers protecteurs (au prix néanmoins d’une jauge de « Mana » le temps de l’activité du pouvoir), vous pouvez devenir une véritable machine de guerre même si, au final, le style du gardien reste la valeur la plus sûre, se protégeant avec son bouclier et occasionnant de lourds dégâts.

Electrifier ses armes, crer un bouclier d'électricité, autant de capacités indispensable mais qui limitent vos autres pouvoirs
Électrifier ses armes, créer un bouclier d’électricité, autant de capacités indispensables mais qui limitent vos autres pouvoirs

Les ennemis étant nombreux et attaquant parfois simultanément, il n’est pas rare de rebondir comme une balle de flipper sur les ennemis, causant rapidement la mort de notre héros, à moins d’être doté de très bon réflexes dans des combats qui ont tendance à durer trop longtemps, même si l’on gagne en puissance. De façon générale, et même en améliorant son équipement, les combats deviennent vite laborieux et vos alliés ne servent le plus souvent qu’à occuper l’ennemi pendant que vous affrontez les autres. Une certaine frustration peut d’ailleurs découler des combats, tant leur issue est souvent incertaine, la faute à des ennemis trop résistants en tout temps, car même si vous farmez un peu, vous ne constaterez jamais une réelle montée en puissance.

Pensez à utiliser les établis pour modifier vos équipements dés que possibles
Pensez à utiliser les établis pour modifier vos équipements dés que possibles

Restent les statistiques – comme la force, l’agilité etc… que vous pouvez faire évoluer tous les 4 niveaux et dont dépendent l‘utilisation de certains équipements, les capacités de combats en 4 arbres distincts (guerrier, roublard, gardien et technomant) et les caractéristiques passives comme le Charisme (utile pour convaincre vos interlocuteurs) mais aussi la Science qui vous sera utile pour soigner des blessés ou discuter avec des scientifiques, voire l’artisanat ou le crochetage afin d’ouvrir les nombreux coffres rouges que vous rencontrerez. Ce système est une excellente idée et permet de faire évoluer très précisément son avatar dans la direction souhaitée, ce qui pallie un peu le maigre choix de personnalisation lors de la création de celui-ci.

Recyclage

Si les environnements ne payent pas de mine et sont au final peu nombreux, la faune a au moins l’intérêt d’être originale et agressive. Mutants, autruches… les sous-sols des villes ou les quelques rares environnements extérieurs regorgent de créatures à abattre en prenant bien soin d’analyser leurs attaques. Car même si l’IA – alliée comme ennemie – est limitée, chaque race possède ses comportements.

Pas moins de 3 écrans de personnalisation vous aideront à façonner votre Technomant
Pas moins de 3 écrans de personnalisation vous aideront à façonner votre Technomant

En terme d’équipement, et même si celui-ci est directement visible sur votre avatar, on reste dans les mêmes notes chromatiques et la même sobriété que l’ensemble. Tout se fabrique et s’améliore sur des établis dispensés un peu partout dans les zones visitées à l’aide des déchets trouvés sur les corps ou des les poubelles. On préfère ici la sobriété à l’esthétique, ce qui encore une fois ne fait pas trop plaisir aux yeux, mais a le mérite de rester cohérent avec l’ambiance désespérée de Mars. Le système de fabrication et de recyclage est d’ailleurs bien pensé, puisque tout ou presque peut-être démantelé pour récupérer des matériaux. Attention tout de même, puisque le poids de l’inventaire entrera en ligne de compte, vous empêchant de courir en cas de surcharge.

Noctis "La ville légendaire" des hommes libres
Noctis « La ville légendaire » des hommes libres

Si comme moi, vous êtes du genre à garder pas mal d’équipement “au cas où”, vous pourrez toujours vous rendre dans votre chambre afin d’y entreposer du matériel, mais aussi et surtout dormir. Cette possibilité vous permettra non seulement de faire passer le temps pour vous réveiller à un moment précis de la journée (utile pour certaines quêtes) mais aussi pour gagner un bonus d’expérience bienvenu lors de vos sorties. Rendez-vous également chez les nombreux marchands pour glaner quelques informations mais surtout des schémas d’équipements vous permettant d’améliorer vos armes et armures à l’aide de sérum et de pièces récupérées un peu partout. Très poussé, ce système reste assez peu introduit dans le titre, comme bon nombre de concepts à “maîtriser sur le tas”.

Mais où ça coince, outre les trop nombreux allers-retours occasionnés par les quêtes obligatoires et les kilomètres de marche inutiles dans les villes où il faut sans cesse se référer à la carte, c’est en terme de mise en scène et de dialogues. Si l’introduction (que vous retrouverez en Live ci-contre) augurait du meilleur, une fois celle-ci terminée, on n’aura guère que des vis-à-vis fixes lors des dialogues et des doublages fort peu convaincants issus d’acteurs trop peu impliqués. Même les thèmes inspirés du compositeur attitré du studio Olivier Deriviere ne semble pas correctement utilisés pour mettre en valeur certains passages marquants. On pense à l’effondrement du toit d’Orphi, exposant une partie de la population aux radiations néfastes et mortelles du soleil qui ne semble avoir aucune importance…

Conclusion

The Technomancer gagnerait à être adapté en roman, car l’univers dépeint et son potentiel ont tout d’une bonne saga SF. Malheureusement, si les bonnes idées foisonnent un peu partout (l’évolution des personnages, le craft, les choix à tous les niveaux, les styles de combat…), rien n’est réellement mis en valeur, le tout étant plombé par une austérité propre au studio Spiders. Si l’univers est passionnant, il est très mal écrit. Si le système de combat est très libre, il est toujours pataud et manque de pêche. Si le système de craft et l’amélioration des équipements sont complets, ils sont plombés par un design général insipide et une absence de conséquence ou presque dans la montée en puissance.

Reste un titre qui reste au-dessus de la proposition précédente (Mars War Logs) et on ne demande qu’une seule choses aux développeurs : voyez moins grand, faites moins, mais faites-le mieux, la base est excellente mais fourmille de détails qui desservent l’ensemble. J’espère néanmoins qu’on se reverra sur Mars car sous ses austères défauts, The Technomancer a tout de même réussi à me donner envie de continuer, à tester ses choix et à voir leurs conséquences.

The Technomancer

  • Développeurs Spiders Studios
  • Type Chroniques martiennes
  • Support PS4, PC, XBox One
  • Sortie 28 Juin 2016

Y’a bon!

  • L’univers de Mars est très travaillé
  • Les choix et leurs conséquences
  • Des statistiques d’évolution très souples
  • Le système de Craft très complet
  • Beaucoup de quêtes qui apportent toutes leur lot d’informations
  • Les musiques d’Olivier Deriviere – comme toujours

Beuargh!

  • Peu d’environnements
  • Des allers-retours à pied incessants et inutiles
  • C’est trop terne
  • Level-design mal fichu
  • Le système de combat peu réactif et laborieux
  • L’absence de réelle mise en scène… après l’intro prometteuse
  • Doublages en mode « Rien à foutre »

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Titiks

Quadra assumé, daron de 3 apprenties gameuses, fan de tout ce qui est capable de raconter une bonne histoire. Touche-à-tout, mais surtout de bonnes aventures qui savent surprendre, et dévoué à l'univers console depuis que Sega était plus fort que tout, vous me verrez bien plus souvent connecté à la nuit tombée #2AMFather.

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