Atelier Ryza est déjà le 21ème épisode canonique de la licence Atelier et sort seulement 6 mois après son prédécesseur: le sympathique Atelier Lulua. Avec un rythme de parution et de localisation aussi rapproché, il était légitime de se demander si Koei Tecmo et Gust allaient réussir à fournir un épisode fidèle à la série et à ne pas lasser son public cible. Après 40 heures passées en compagnie de Ryza (qui ont été suffisantes pour assister au dénouement de l’histoire), je pense pouvoir éclairer la lanterne de ceux qui se tâtent encore à tenter l’expérience.
Un début difficile
Atelier Ryza commence comme à peu près tous les opus de la saga Atelier. On incarne une jeune fille, Reisalin Stout (aka Ryza), vivant une vie tout à fait normale sur une petite île avec ses amis d’enfance et sa famille. Au début de son aventure, Ryza s’ennuie ferme et rêve d’aventure. Vous vous en doutez, comme dans chaque épisode, notre héroïne va à un moment donné être confrontée à l’alchimie et être catapultée apprentie jusqu’à devoir sauver son île d’une catastrophe. Je n’en dirai pas plus pour ne pas trop vous gâcher les surprises du scénario.
Le principal problème de l’histoire d’Atelier Ryza est que les premiers chapitres nous situent dans un contexte où Ryza s’ennuie comme un rat mort et traînent particulièrement en longueur. On sent que Ryza s’ennuie à un point que cela en devient contagieux pour le joueur. En effet, les premières missions de l’histoire servent surtout à nous familiariser avec les bases des systèmes d’exploration et de combat tout en nous introduisant un bon nombre d’habitants du village (qui n’ont pas un charisme fantastique).
Il faudra quelques heures de jeu avant de rencontrer les personnages qui feront de Ryza une apprentie alchimiste et presque 10-15 heures avant que le scénario nous propose une réelle aventure digne de ce à quoi la saga nous a habitués. De plus, vous ne bénéficierez pas d’emblée d’un système de voyage rapide efficace pendant ces premières heures de jeu. Par conséquent, ce début d’aventure devient d’heures en heures de plus en plus barbant au fil des nombreux allers-retours à faire entre la ville et la première zone d’aventure où vous établirez votre « Secret Hideout ». Rassurez-vous, les voyages rapides se débloquent par la suite.
La magie feel good opère
Avec un début aussi soporifique, je vous avouerai que j’ai failli laisser tomber le test à ce stade et mettre une note catastrophique au jeu. Cependant, c’est après cette dizaine d’heures d’introduction que la magie d’Atelier Ryza opère et en fait un épisode intéressant.
En effet, une fois arrivé au stade de l’histoire où vous comprendrez le sens du sous-titre du jeu « Ever Darkness & The Secret Hideout », Atelier Ryza nous propose une histoire abordant des thématiques plus sérieuses et captivantes. Certes, on reste dans le cliché d’une menace pour l’île que Ryza et ses amis devront déjouer grâce à l’alchimie. Toutefois, le joueur sera amené à se rendre compte que tout n’est pas rose dans l’alchimie. Celle-ci peut avoir des conséquences dramatiques pour l’environnement en fonction de son utilisation. Nous serons alors conscientisés comme Ryza à essayer de réparer les dégâts de la meilleure façon possible pour tout le monde.
Ceci introduit une thématique « écolo » qui colle assez bien à l’ère du temps. De plus, vos 5 coéquipiers ont chacun un sous-scénario propre qui touche à des sujets « éducatifs » tels que la confiance en soi ou des situations familiales difficiles. Il sera donc assez aisé pour le joueur de s’identifier à certains personnages et de prendre plaisir à continuer son aventure.
Gust a même réalisé un effort au niveau du système de quêtes secondaires donnant de mini scénarios aux NPCs qui vous confieront des tâches annexes. Certes, ces personnages n’ont pas vraiment d’importance mais c’est un petit plus qui leur « donne vie » là où ils n’avaient strictement aucune importance dans les anciens opus.
C’est d’ailleurs grâce à certains de ces NPCs que le titre propose quelques petites touches humoristiques qui sont malheureusement un peu moins présentes que dans Atelier Lulua. Mention spéciale à Romy, la marchande itinérante qui prendra un malin plaisir à taquiner Ryza.
Le seul petit reproche que je pourrais faire au niveau du scénario est qu’il y a à nouveau bon nombre d’événements optionnels pour lesquels on ne reçoit aucun indice quant à leur déclenchement. C’est dommage car certains sont assez sympathiques et on risque de facilement passer à côté si on ne se rend pas dans les zones où ils se déclenchent au bon moment. J’ai par hasard déclenché un événement laissant penser qu’il y aurait peut-être un event « hot springs« , mais n’ai pas trouvé comment le faire progresser.
Même constat pour les quêtes optionnelles qui, bien que visibles sur la carte grâce à un symbole, peuvent parfois ne jamais devenir déclenchables du fait qu’une condition préalable n’est pas remplie. Le jeu ne vous donnera malheureusement pas plus d’indications sur quoi faire pour les déclencher. En fin de partie, je me suis retrouvé avec une seule quête secondaire dans un statut bloqué sans savoir quoi faire.
Au final, tout ceci étant mis en scène avec le character design et l’esprit kawaii/rose bonbon dont la licence Atelier a le secret, on se retrouve malgré ces petits désagréments avec un opus intéressant que l’on peut réellement mettre entre toutes les mains. Par pitié, ne vous arrêtez pas au design de certains personnages féminins en pensant que le jeu tombera dans le fan service et l’érotisme facile.
Un chaudron rutilant
Atelier Ryza introduit un tout nouveau système d’alchimie particulièrement réussi.
Tout d’abord, il est important de noter que cet épisode (comme les plus récents) supprime le système de calendrier in-game. Il n’y aura donc aucune pression de temps vous menant au game over comme dans les plus vieux épisodes. Par conséquent, autant le fait de récolter des ingrédients que de crafter ne vous mettra aucune pression inutile. C’est pour moi ainsi beaucoup plus agréable de partir récolter pour ensuite retourner faire notre popote dans notre atelier.
Le système de création d’objet est toujours au cœur du gameplay et à la fois pratique et ergonomique. Dans cet épisode, la plupart des nouvelles recettes alchimiques importantes s’obtiennent de 2 façons. Soit automatiquement grâce au scénario, soit en craftant ! En effet, dans Atelier Ryza, c’est en « alchimant » qu’on devient alchimiste ! Ryza pourra développer de nouvelles idées de recettes sur base de celles qu’elle connait déjà en les améliorant.
Ceci est modélisé par un arbre de matériaux utilisables pour chaque recette. Une fois un stade dans l’arbre atteint, une nouvelle recette se débloque, ayant elle aussi son propre arbre de matériaux. On est au début limité par le nombre d’ingrédients pouvant être utilisés par recette, mais celui-ci augmente au fur et à mesure de votre montée de niveau en alchimie. L’arbre de matériaux vous limite également en vous en demandant parfois certains spécifiques, ou en ayant certaines propriétés pour débloquer le nœud suivant.
Bien qu’il y ait beaucoup de règles à ce système, on en comprend assez vite les subtilités pour créer des objets puissants qui seront à nouveau requis pour vaincre les 3 boss majeurs du scénario principal. Ces derniers, en fonction du mode de difficulté dans lequel vous jouez, demanderont que vous passiez quelques heures à mettre à jour votre arsenal d’objets utilisables et votre équipement pour en venir à bout. Comme dans la plupart des épisodes, on assiste à un grand gap de difficulté au moment de faire face au boss final. Le post-game vous propose d’ailleurs de nouveaux boss pas piqués des hannetons qui pourront s’avérer un challenge pour les joueurs en recherche de difficulté.
Le tout dernier (je pense ?) boss du post-game nécessite d’ailleurs d’utiliser une nouvelle feature d’Atelier Ryza permettant de créer de nouvelles zones d’exploration sur base de matériaux. Un peu à la façon de Cartman qui a créé une civilisation d’êtres des mers, vous pourrez fabriquer des zones à partir de n’importe quoi. La dernière que vous pourrez produire vous réserva une rencontre avec ce fameux boss.
Un système de combat entièrement repensé
Je finirai ce test en vous parlant du mieux possible du système de combat novateur pour la série qu’introduit Atelier Ryza.
Bien que l’on reste toujours dans un système de combats de JRPG classique, Gust a décidé d’implémenter quelque chose de beaucoup plus dynamique que son tour par tour habituel. Ici, le tour de vos personnages et de vos adversaires dépendra d’un timer variable en fonction de vos actions (par exemple, utiliser un objet résultera en un timer généralement plus long que faire une attaque de base). De plus, choisir une action ne mettra pas ce timer sur pause pour votre personnage actif. Vous n’aurez donc pas le luxe de réfléchir 5 minutes à quelle action choisir car vos ennemis ne vous attendront pas pour vous mettre la fessée comme dans un tour par tour classique.
Vos 2 coéquipiers (parmi 6 jouables) sont toutefois contrôlés par l’IA et agissent sans délai. Vous pouvez dynamiquement les faire passer en mode offensif (ils canardent les mobs de skills en consommant tous vos précieux action points), ou passif (ils n’utilisent que des coups normaux, ce qui vous fait stocker des action points). A tout moment, il est possible de prendre le contrôle de n’importe lequel de vos 3 personnages d’une simple pression de touche.
Votre équipe peut être répartie sur 2 lignes. L’intérêt de ces 2 lignes dépend du rôle de vos personnages. En fonction de comment vous équiperez vos combattants, ils pourront soit avoir un rôle offensif, défensif ou de soutien. Chaque rôle a un intérêt de se retrouver seul ou accompagné sur une ligne. Le « high attacker » a par exemple des bonus d’attaque et de critical hit s’il se trouve sur la même ligne qu’un autre personnage. Etant donné que ce rôle dépend de l’équipement, vous pourrez à tout moment personnaliser chaque membre comme vous l’entendez.
Atelier Ryza rend le système de combat assez subtil grâce à d’autres nouvelles fonctionnalités : les AP (action points), CC (core crystals), Tactics Level , Quick Actions, Break status, Extra Order et Fatal Drive.
Ce n’est pas particulièrement facile de tout résumer dans un texte, car tous ces concepts sont expliqués dans de nombreux tutoriels in-game; mais je vais essayer afin de vous en montrer la richesse ci-dessous.
- CC : Une des grosses différences d’Atelier Ryza ! Chaque personnage peut porter un nombre fixe et très limité (1-4) d’objet utilisables (bombes, objets de soin, etc.). Les utiliser en combat nécessite un nombre de CC en fonction de l’objet. Votre stock de CC se recharge une fois de retour à l’atelier. Lorsque ce stock tombe à 0 en combat, vous ne pouvez plus utiliser d’objets. Fini le spam infini d’objets. Il y a toutefois une exception à cette règle. Lors de votre tour, vous pouvez rendre un objet inutilisable jusqu’à votre retour à l’atelier pour recharger votre compteur de CC à 100%. Ceci constitue une chouette dimension stratégique qui n’existait pas auparavant. Dernier point important, chaque personnage jouable peut porter et utiliser des objets, pas seulement les alchimistes comme dans les opus précédents.
- AP : Action Points. Toute action que vous ou vos équipiers effectuez rapporte un nombre d’AP. Ces AP permettent d’utiliser les skills de vos persos, d’effecteur une quick action ou de monter votre Tactics Level
- Tactics Level : Vous commencez tout combat au Tactics Level 1. En combat, vous pouvez le faire monter en consommant un certain nombre d’AP. Cela a pour effet d’augmenter la puissance de tous vos coups, skills et d’augmenter le nombre d’AP que vous pouvez avoir. Autrement dit, vous avez intérêt à vite augmenter votre Tactics level dans les combats difficiles.
- Break Status : les monstres et vos personnages ont une jauge de break en dessous de leur jauge d’HP. Chaque coup reçu fait diminuer cette jauge. Une fois à 0, votre perso ou votre adversaire sera « stun ». Il prendra un maximum de dégâts et ne pourra pas agir pendant un certain temps.
- Quick Actions : Le seul moyen de mettre le combat en pause est de dépenser 10 AP pour réaliser une quick action. Cette pause vous permet d’effectuer n’importe quelle action pour peu que vous ayez les AP ou CC nécessaires. Gérer les quick actions au bon moment sera vital contre la plupart des boss. Après un certain temps, ils prépareront toujours une attaque chargée qui peut parfois vous one-shot si vous n’avez pas le niveau ou le bon équipement. Lorsqu’un boss charge une attaque, il sera important d’essayer de le stun le plus vite possible. Les quick actions seront votre meilleur atout pour ce faire.
- Extra Order : Pendant qu’un monstre charge une attaque, effectuer une Quick Action permet à vos coéquipiers d’effectuer un Extra Order si vous faites ce qu’ils vous demandent. Généralement ils vous demanderont d’utiliser un skill. Cela déclenchera une attaque surpuissante de vos camarades qui fera grandement baisser la jauge de break de votre adversaire en même temps que de lui faire de gros dégats.
- Fatal Drive : THE FINAL BIG ATTACK à la Power Rangers. Cette technique à double tranchant n’est utilisable que si votre Tactics Level est au niveau 5. Il fait retomber ce dernier au niveau 0 suite à une attaque dévastatrice. Autant dire que si vous n’achevez pas votre adversaire ou que vous ne le faites pas passer en stun suite à votre Fatal Drive, vous êtes dans le caca.
Toutes ces possibilités en combat fournissent un système extrêmement riche et dynamique qui prend tout son sens lorsque l’on joue dans un mode de difficulté supérieur. Sachez qu’une fois l’histoire terminée, vous débloquez 2 nouveaux modes de difficulté si vous aviez trouvé les choses trop faciles jusqu’ici.
Il est toutefois important de noter qu’en mode normal ou facile, vous n’aurez pas franchement besoin d’être un fin stratège ou d’avoir des équipements et objets overpowered pour finir le jeu. Je salue juste le fait que Gust ait pris le temps de repenser complètement les combats en tenant compte des différents types de joueurs.
Conclusion
Atelier Ryza sera peut-être l’épisode qui conciliera à la fois les fans de la licence et les amateurs de JRPG plus classiques, pour peu d’avoir la patience de terminer les 10-15 premières heures servant d’introduction à son intrigue.
En effet, cette longue introduction peine réellement à captiver. Elle sert surtout à introduire les personnages et les nombreuses subtilités des systèmes de combats, d’alchimie et d’exploration. Une fois ce cap passé, on commence alors à s’attacher aux personnages et à leurs interactions, touchant pour une fois des sujets sociétaux un peu plus sérieux.
Au final, je trouve qu’Atelier Ryza fait partie de ces « feel good games » car on peut facilement s’identifier aux personnages et à certains événements qu’ils vivent. On prend plaisir à aller faire nos récoltes, crafter des objets toujours plus puissants grâce à un bon système d’alchimie et enfin partir à l’aventure pour faire progresser le scénario au rythme de combats beaucoup plus dynamiques qu’à l’accoutumée.
Atelier Ryza : Ever Darkness & The Secret Hideout
- Développeur Gust
- Éditeur Koei Tecmo
- Type JRPG
- Support PS4, Switch, PC
- Sortie 1 Novembre 2019