Croyez-le ou non, j’avais complètement oublié la sortie européenne de Dragon Quest XI Les Combattants de la Destinée jusque quelques jours avant sa sortie. Ou plutôt, le mois de septembre a semblé arriver très vite avec toutes ces excellentes sorties à traiter ces dernières semaines. Et voilà qu’il fallait inopinément débloquer une bonne soixantaine d’heures au bas mot dans un planning déjà bien chargé ! Alors tant pis pour le référencement, le temps a été pris pour s’immerger dans cette version européenne du dernier Dragon Quest.
Unreal Elrea
Cette sortie européenne – rappelons que le jeu est sorti il y a un an au Japon – s’accompagne de plusieurs petites mises à jour qui devraient nous faciliter quelque peu l’aventure. Oh, non pas que le titre soit difficile loin, de là – quoique certains boss m’ont demandé un peu de farm pour acheter de nouvelles armures et débloquer les compétences utiles – mais Square-Enix a mis en application les retours des joueurs japonais pour parfaire cette version.
En résultent donc la possibilité de courir très rapidement pendant les phases d’exploration, rendant l’utilisation du cheval quelque peu inutile, une petite refonte de l’interface que je ne trouve pourtant pas des plus ergonomiques, mais nous y reviendrons, et l’ajout d’un doublage quasi intégral en anglais. “Hérésie !”, crierez-vous, et telle fût ma réaction aux premiers mots anglais prononcés par Gemma dans l’introduction du jeu. Pour la défense, la version japonaise n’embarquait aucun doublage du tout, Yuji Horii souhaitant pouvoir retravailler les scénario jusqu’au dernier moment (chose rendue impossible une fois les voix enregistrées – n’est-ce pas FFXV ?) ainsi que pour s’approcher au plus de la grande tradition des Dragon Quest muets. On ne rigole pas avec cette série au Japon.
Par contre, un JRPG de cette envergure intégralement muet en 2018 avait de quoi choquer pas mal de monde. Au moins un effort a été concédé à la communauté, mais pour un résultat parfois irritant – et cela me rappelle que le prochain Kingdom Hearts n’aura lui aussi qu’un doublage américain… La vie est mal faite, mais on s’y habitue très rapidement.
Passées ces quelques déconvenues, on se retrouve dans un titre visuellement flamboyant. Tout ceux s’étant extasiés à l’époque devant Dragon Quest VIII (réalisé par Level-5) retrouveront ici un monde magnifique et lumineux, des créatures à la fois admirablement modélisées, respectueuses du style de Toriyama et de la tradition de la série en 2D. Les combats se déroulent au tour par tour, les créatures pouvant être évitées pendant l’exploration, avec jusqu’à 4 personnages par équipe (contre 3 sur la version japonaise), tandis que tout le monde profite de l’expérience engrangée. Si la série était auparavant connue pour sa difficulté, son arrivée sur console de salon l’ouvre au plus grand public, et il faudra passer par un menu spécial pour augmenter la difficulté (en rendant par exemple les monstres plus forts, en bloquant les achats en boutique ou en interdisant carrément de s’équiper d’armure – amateurs de challenge, vous êtes servis).
Dans la grande tradition de la série, on incarne un héros bien muet qui se révèle être l’élu de la Lumière (ou « l’Éclairé » ), destiné à repousser les Ténèbres et qui vient se présenter comme tel devant le roi de son pays. Et – Ô surprise – loin de l’accueillir avec bienveillance, interprète son apparition comme le signe de l’arrivée imminente du Mal et le jette dans les geôles du palais. Un point de départ inattendu mais qui plongera le joueur dans une quête épique à travers le monde contre le Mal incarné, de retour sur Elrea. En filigrane, un complot séculaire, de la manipulation et un monde bientôt livré totalement au Mal, qu’il faudra reconquérir au prix de batailles dantesques.
Néanmoins, si le contenu et la narration sont de qualité, je dois dire que cet épisode reste très avare en surprise. Il s’agit – malgré ses visuels – d’un JRPG d’un classicisme absolu qui ne cherche à aucun moment à nous étonner. Le rythme est cependant très bien mené, les personnages sont attachants et les moments de bravoure ne manquent pas, pourtant, on y progresse en ayant constamment – en tant que joueur – une longueur d’avance sur les événements.
Dragon Quest XI est une œuvre maîtrisée à l’extrême
On a alors rapidement l’impression de relire un manga qu’on a beaucoup aimé, en étant surpris ça et là par les détails qu’on avait oubliés, mais en gardant la trame principale bien en tête. Je me permets cette analogie puisque la sortie de Dragon Quest XI m’a incité à relire l’intégralité de l’excellent Dragon Quest Daï (Fly) qui dormait sur mes étagères. On ne compte donc plus les situations qui nous demandent de réaliser une bonne grosse quête locale dans une nouvelle région, d’abattre un boss avant de s’entendre dire que “ah finalement non, ce que tu cherches a été volé/vendu/n’est pas ici”. Un schéma classique et redondant les premières heures qui – d’un point de vue macro – est irritant, tant on a l’impression de perdre son temps en batailles inutiles durant la première vingtaine d’heures. Si l’on se concentre sur le micro par contre, ces histoires de régions sont intéressantes, rythmées et drôles, et au final, on constate que ces minis-histoires sont liées à la trame globale, surtout dans la seconde partie du titre.
L’occasion de fouler les grandes cartes qui nous sont offertes dans un monde ouvert à la japonaise (comprenez par là que nous avons diverses grandes zones reliées par des couloirs) au découpage quelque peu original puisque – outre permettre de grimper sur certaines hauteurs – certaines zones ne sont uniquement accessibles que via une monture à capturer sur les ennemis. Certains donjons mettent également ce système à profit en agençant leurs pièces et mécanismes de manière à ce que l’on soit obligés de trouver et gérer une monture provisoire pour progresser.
Très linéaire dans sa première quinzaine d’heure, Dragon Quest XI s’ouvre aux joueurs une fois la mer extérieure atteinte et se permet même le luxe de nous faire lâcher un peu à l’aveugle dans son monde une fois la quête des Orbes débutée. L’occasion de fouiner un peu partout et de tomber tout naturellement sur la suite de la quête principale en ayant l’agréable impression de l’avoir découverte soi-même. La seconde partie de l’aventure relance un peu les dés façon Final Fantasy VI et nous fait parcourir de nouveau le monde avec d’autres paramètres en tête, de nouveaux alliés et de nouveaux objectifs. L’intérêt est sans cesse renouvelé, que cela soit dans l’exploration avec de nouveaux lieux accessibles, dans la gestion de l’équipe et bien entendu dans le scénario, certes classique mais réellement épique.
Si le farm n’est pas réellement de mise dans cet épisode – la montée de niveau se faisant naturellement si vous n’essayez pas d’éviter les combats – la progression octroie aux héros un bonus de statistique déployé automatiquement et occasionnellement de nouveaux sorts, mais aussi quelques points qu’il est possible de dépenser dans un genre de petit sphérier nommé Hexagramme unique par personnage dont les cases se débloque au fur et à mesure.
De ce côté là, on remarque que chaque personnage peut être monté dans plusieurs directions, un personnage comme Séréna excellent dans les arts curatifs peut également s’orienter au combat à la lance, ou Théo, premier mage à posséder le sort de Rappel, mais également un combattant aux griffes. Chaque personnage possédant plusieurs routes sur leur hexagramme, c’est au joueur qu’il incombe de créer son équipe équilibrée avec les talents de chacun, sachant qu’il est possible de redistribuer ses points à l’église contre un peu d’argent, lieu de sauvegarde et également le seul moyen de connaître votre prochain palier d’XP. A l’ancienne on vous dit.
Le système de combat reste au tour par tour (ouf) sans jauge de progression ou moyen de savoir quel personnage jouera ensuite, et oblige à bien gérer son équipe. Il est évidemment possible de modifier son équipe en cours de combat pour pallier à la mort d’un membre (le sort Rappel n’ayant que 50% de chance de réussite – Ô joie !), et on aura vite fait de privilégier l’excentrique Sylvando et ses nombreuses capacités d’altération, la puissance de Jade, les soins salvateurs de Séréna ou la puissance magique de sa soeur jumelle Victoria. Mais si vous désirez glaner quelques niveaux rapidement, c’est Eric et son boomerang qu’il vous faudra intégrer puisque celui-ci possède une attaque destinée aux gluants particulièrement efficace, qui vous sera bien utile pour dégommer les Gluants de Métal, rares mais très riches en points d’expérience. Suivant les situations, les membres de l’équipe pourront entrer en Hypertension, état de transe boostant leurs statistiques et permettant, suivant les membres dans cet état au même moment, de lancer des attaques combinées dévastatrices, mettant fin à cet état. A vous alors de choisir entre privilégier les effets de l’Hypertension ou d’utiliser l’une des nombreuses attaques combinées pour mettre fin plus rapidement aux combat.
L’argent est également à gérer puisque s’il vous permet de faire le plein d’objets et d’améliorer votre équipement, un pourcentage vous sera ponctionné à chaque défaite pour recharger votre partie, à moins que vous n’ayez pris soin de le placer en banque.
Au niveau de l’équipement, on ne s’étalera pas trop longtemps sur les magasins disponibles en ville pour se concentrer sur la Forge, bien plus efficace quand il s’agit de créer des équipements dotés de caractéristiques plus puissantes, si tant est que vous ayez découvert la recette en fouillant les bibliothèques du jeu ou certains coffres. Disponible aux feux de camps servant aussi de points de sauvegarde sur la carte, la Forge magique permet donc de créer armes, armures et accessoires spécifiques si vous disposez de la recette et des ingrédients en frappant différentes parties de l’arme en essayant d’atteindre une zone très précise déterminant son bonus (de +1 à +3 et croyez-moi, on voit la différence). Au fil de vos créations, vous gagnerez des compétences qui vous permettront de frapper plus ou moins fort, plus précisément ou de frapper plusieurs zones en même temps, l’activité étant soumise à des points d’endurance qui se décomptent à chaque coup. Vous gagnerez aussi des orbes d’amélioration qui elles vous permettront d’améliorer un équipement déjà fabriqué ou acheté pour gagner en statistique. Une activité aussi amusante qu’utile en jeu et dans laquelle il faut investir dès les premières heures pour monter de niveau le plus rapidement possible.
Les musiques par contre sont assez répétitives, et le thème de l’exploration finira par vous agacer un peu au fil de vos pérégrinations. Pourtant pointée du doigt, l’ergonomie générale du menu pourra en dérouter plus d’un, car les options les plus utiles – hormis l’équipement et la magie – sont regroupées dans un sous-menu sobrement intitulé “Divers”, contenant le soin global de l’équipe (complet ou en mode Eco très utile pour ne pas vider vos réserves) ou encore l’accès à l’Hexagramme pour améliorer vos aptitudes. L’accès à la carte du monde se fait par le biais de la touche Carré, fonction qui rappelle en même temps l’objectif en cours.
Conclusion
C’est un JRPG aussi classique que réussi qui nous est offert ici avec ce Dragon Quest XI, et qui profite également d’améliorations depuis sa version japonaise. On pourra regretter l’absolu classicisme de l’épisode, mais rappelons-nous qu’il s’agit ici de Dragon Quest, une série vidéoludique figée dans le temps qui offre à ses fans exactement ce qu’ils souhaitent. Les heures défilent à bon rythme, allant de révélations en moments épiques, le tout emballé dans une apparence graphique sans défaut. S’il ne faut pas venir y chercher de l’originalité, Dragon Quest XI est une oeuvre maîtrisée à l’extrême capable de nous captiver pendant plusieurs dizaines d’heures sans peine.
Dragon Quest XI
- Développeurs Square-Enix
- Type JRPG
- Support PS4
- Sortie 04 Septembre 2018