On a toujours dit qu’il était mal vu de jouer au délateur. Mais quand vous êtes grassement rémunérés pour ce rôle, est-ce que le point de vue change ? C’est le dilemme moral proposé par l’excellent Beholder, développé par Warm Lamp Games et émis sur PC en 2016, et sur PS4 le 16 janvier prochain. Dans un cadre spatio-temporel proche de l’ancienne URSS, vos yeux et vos oreilles seront vos meilleures amies.

Pour la Mère Patrie ! …

Test Beholder PCDans Beholder, vous incarnez Carl Stein, qui emménage dans un immeuble dont il a été nommé nouveau gestionnaire, avec sa famille composée de sa femme, sa fille et son fils. C’est en réalité le Gouvernement qui vous a engagé afin de faire régner
l’ordre sur votre territoire. En cette dure période de l’année 1984, la dictature communiste bien ancrée sur le pays en guerre civile émet des directives à ne pas transgresser quasi quotidiennement, et il est de votre devoir de surveiller chaque locataire de votre immeuble. Si l’un d’entre eux est pris en pleine transgression, un petit tour par votre console de surveillance vous permettra de dresser un rapport complet ; la police se chargera du reste, et vous serez payé pour votre bon travail.

Test Beholder PC

Votre devoir de surveillant se fait quasiment en continu. Même si quelques missions surviennent de manière ponctuelle en fonction des locataires et des appels du Ministère de l’Ordre, vous vous devez d’enquêter à chaque seconde qui passe. Pour ce faire, interrogez vos locataires en les frottant dans le sens du poil, passez un œil dans leurs serrures pour voir s’ils sont chez eux, et si non, entrez simplement pour fouiller leur logis de fond en comble. Les informations pertinentes que vous trouverez vous permettront, sur votre console de surveillance, d’établir le profil du locataire contre quelques centaines de dollars. Comme quoi, balancer du monde, ça paie plutôt bien…

Aussi, chaque information retrouvée ou mission accomplie pour vos locataires vous procurent des points de réputation : vous pouvez les utiliser afin d’acheter du matériel de surveillance, comme des caméras à placer dans chaque appartement.

… Ou pas ?

En vérité, vous avez encore le choix d’agir en bon patriote ou de servir la résistance. Vous recevrez bientôt des appels d’un mouvement appelé « Nouvel Avenir »/ « Nouveau Lendemain » (car les sous-titres du jeu et la voix off ne se sont pas mis d’accord à ce sujet) qui vous proposera des missions afin de renverser les plans du Gouvernement. Celles-ci sont aussi bien rémunérées, mais allant à l’encontre de votre premier employeur, elles risquent de vous pénaliser, voire de vous faire renvoyer.

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Vos différentes options pour défendre l’Ordre: un rapport pour balancer vos locataires, un profil pour envoyer des informations, et des lettres de chantage.

C’est à vous de suivre ce que votre morale vous dictera, ce qui vous mènera vers des fins différentes. Aussi, réfléchissez auquel des deux destinateurs vous permettra au mieux de prendre soin de votre famille ; car celle-ci a des besoins financiers qui ne vont qu’en grandissant, et leur issue peut être fatale si vos économies sont trop maigres. Un dernier moyen s’offre alors à vous pour gagner de l’argent facilement : les lettres de chantage adressées à vos locataires. Vous les avez vus transgresser une directive ? 2000$ dans la plante verte du hall et on n’en parle plus.

Quoi qu’il en soit, peu importe ce que votre cœur vous dira de faire : vous finirez toujours à un moment donné par servir celui qui paie le mieux (et on prendra parfois un malsain plaisir à faire le mal plutôt que le bien !)

Une technique moit’moit’

En plus de son concept excellent, mais qui n’est pas sans rappeler le jeu Paper, Please, Beholder se démarque également grâce à son OST et son design. Les boucles aux tonalités sombres accompagnent parfaitement la froideur de l’ambiance générale. Un immeuble miteux sous un ciel gris et pluvieux, dans un pays indistinct où règnent guerres et propagandes. Ajoutez à cela le son de l’horloge qui annonce le passage du jour à la nuit et inversement : un glas qui surprend au départ, mais qui s’accorde parfaitement avec le reste et qui donne le ton de l’histoire.

Les graphismes sont faits dans la sobriété : les seuls éléments détaillés sont ceux du décor, et plus principalement les appartements – eux-mêmes sobrement décorés et au minimum du confort. Les personnages ne sont que des silhouettes noires aux yeux blancs et luminescents (parce que c’est plus facile de balancer quelqu’un qui nous sera inconnu du début à la fin, une silhouette qui n’a qu’un nom, une profession et un âge ?) On évolue constamment dans le même type de décor, pendant plusieurs semaines du mois de septembre 84, à travailler à la fois pour une dictature et une résistance, à fouiller, épier et interroger, … dans des missions qui sont plutôt restreintes, mais parfois longues.

En effet, vos locataires font leurs propres allées et venues au sein de l’immeuble, et vous devrez les attendre de longues minutes avant de pouvoir interagir avec eux. Il vous faudra aussi avoir recours de temps en temps au revendeur du marché noir, qui n’arrive qu’à un moment précis de la journée ; si vous le ratez, vous n’avez plus qu’à attendre le lendemain.

D’autres missions vous demanderont de dépenser des sommes élevées, ce qui n’est pas non plus simple à obtenir car les transgressions qui ne sont pas signalées pour une mission du Gouvernement sont beaucoup moins bien payées.

Cependant, la mécanique du jeu est assez addictive et l’on y passe facilement plusieurs heures sans s’en rendre compte, pour une durée de vie totale de moins de 10h. On se réjouit alors du DLC « Sommeil Béat » pour pouvoir prolonger un peu le plaisir de quelques heures environ, en découvrant un nouvel aspect moral qui fait du concept de Beholder une réussite, même si plutôt maigre en termes d’innovations.

Test Beholder PC

Un petit gameplay pour vous convaincre?

Conclusion

Dans l’attente, la redondance du gameplay qui se limite en somme à fouiller-dénoncer, des sous-titres aux traductions littérales et douteuses, et le manque de moyens financiers à certains moments cruciaux du jeu, Beholder pourrait être une véritable mine de frustration. Cependant, son concept – même s’il n’est pas révolutionnaire – reste plaisant et l’on adhérera plutôt bien à ce point-&-click de stratégie et d’enquête coincé dans une dystopie.

Outre son ambiance qui ne reflète que la tristesse de l’époque, on retiendra ce conflit moral imposé au joueur, cette question de faire le bien ou le mal, à quel prix et pour quels motifs. Si chacun d’entre nous se pense droit dans ses bottes, une légère immersion dans la vie de Carl Stein vous prouvera le contraire et que, pour survivre, les mauvais choix sont parfois les meilleurs.

Beholder

  • Développeurs Warm Lamp Games
  • Type point-&-click, stratégie
  • Support PS4, PC
  • Sortie 09 Novembre 2016
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Queen Potato

Prof de français excentrique le jour, gameuse la nuit, Queen Potato soumet les jeux vidéo à sa botte pendant des live streams endiablés. Sauf les survival horror. Ceux-là sont encore des espèces qui lui donnent du fil à retordre.

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