Yoshio Sakamoto, producteur et auteur de la série Famicom Detective Club, vient de dévoiler quelques détails sur la conception du premier opus en plus de 30 ans : Emio – L’Homme au sourire. Du coup, nous serions en droit de nous poser la question : C’est quoi, Famicom Detective Club ?
Au cœur des années 80, Nintendo s’aventure sur le terrain du roman visuel avec la série Famicom Detective Club. Une incursion inattendue, qui, bien que tombée complètement dans l’oubli, a contribué à poser les bases du jeu d’aventure et d’enquête. Nous avons eu récemment eu la chance de pouvoir redécouvrir les deux premiers épisodes réédités par Nintendo, des classiques méconnus, qui, avec leurs mystères et leur ambiance unique, ont su marquer les joueurs de l’époque et ne manqueront pas de fasciner aujourd’hui.
L’enquête immortelle de Nintendo
Au milieu des années 80, Nintendo est en pleine ascension. La Famicom, ou la NES en occident, connaît un succès retentissant au Japon, révolutionnant l’industrie du jeu vidéo. C’est dans ce contexte que Nintendo décide de s’aventurer au-delà de sa zone de confort des jeux d’action et de plates-formes. La compagnie s’associe à un jeune scénariste prometteur, Yoshio Sakamoto, pour créer une expérience narrative unique : Famicom Detective Club.
Qui est Yoshio Sakamoto ?
Yoshio Sakamoto est aujourd’hui un vétéran de l’industrie du jeu vidéo, un créateur visionnaire qui a laissé une empreinte indélébile sur le paysage du jeu vidéo. Maintenant connu pour son travail chez Nintendo, Sakamoto a contribué à façonner certains des titres les plus emblématiques de la compagnie, démontrant un talent pour le design de jeux, l’écriture de scénarios et la direction créative.
Sakamoto est né au Japon et a donc rejoint Nintendo au début des années 80, à une époque où l’industrie du jeu vidéo connaissait une croissance exponentielle. Il a fait ses débuts en tant que designer sur des titres tels que « Balloon Fight » (1984) et « Wrecking Crew » (1985), travaillant aux côtés de légendes comme Shigeru Miyamoto. C’est cependant avec nulle autre que la série Metroid que Sakamoto a laissé sa première marque indélébile.
Sakamoto a en effet joué un rôle crucial dans la création de la série Metroid, un franchise qui a tout de même révolutionné le genre de l’action-aventure. Sous le pseudonyme de « Shikamoto », il a contribué à la conception des personnages et des niveaux pour le premier jeu « Metroid » (1986), qui a introduit le monde à Samus Aran. Sakamoto a continué à travailler sur plusieurs suites de Metroid, y compris « Super Metroid » (1994), souvent considéré comme l’un des plus grands classiques du jeu vidéo. Son influence sur la série est profonde, ayant dirigé ou produit la majorité des titres Metroid jusqu’à aujourd’hui.
Il a travaillé sur une variété d’autres projets chez Nintendo, démontrant sa capacité à innover et à créer des expériences de jeu uniques. Il a été game designer sur « Kid Icarus » (1986), et a contribué à la série Wario, notamment avec « Wario Land 4 » (2001) et « WarioWare » (2003). Ces jeux ont montré le côté ludique et expérimental de Sakamoto, offrant des expériences de jeu amusantes et inattendues.
Sakamoto a également exploré des horizons différents avec la série qui nosu intéresse aujourd’hui, Famicom Detective Club, au milieu des années 80. En tant que scénariste principal, il a créé une histoire captivante, pleine de mystères, démontrant sa polyvalence en tant que conteur. Cette série de romans visuels a contribué à poser les bases du genre sur consoles, offrant une expérience narrative immersive qui a captivé les joueurs japonais à l’époque.
Le style de design de Sakamoto est caractérisé par sa capacité à créer des mondes immersifs et des personnages mémorables. Il excelle dans la conception de scénarios et mystères complexes, faisant appel à l’imagination des joueurs. Ses jeux sont souvent connus pour leur atmosphère unique, leur gameplay réussi et leurs histoires captivantes.Sakamoto a également influencé de nombreux développeurs de jeux d’aventure et de romans visuels, sa série Famicom Detective Club étant considérée comme une source d’inspiration pour le genre, sans laquelle nous n’aurions sans doute pas les Ace Attorney.
La série Famicom Detective Club se compose de deux titres : « The Missing Heir » (1988) et « The Girl Who Stands Behind » (1989), sortis exclusivement au Japon sur Famicom Disk System, un périphérique de la Famicom utilisant encore des disquettes comme support. Ce format permet une plus grande capacité de stockage, idéale à l’époque pour les Visual Novels.
Famicom Detective Club : The Missing Heir (1988)
« The Missing Heir » est le premier volet de la série Famicom Detective Club, et pose les fondations de cet univers d’enquête et de mystère. Le joueur se retrouve dans la peau d’un détective amnésique, un choix intrigant qui ajoute immédiatement une couche de mystère et de complexité à l’expérience. Le jeu s’ouvre sur une scène captivante : le protagoniste se réveille dans un manoir imposant, entouré de personnages énigmatiques. Il découvre rapidement qu’il est chargé d’enquêter sur la mort suspecte du patriarche de la famille Ayashiro, un puissant clan au passé trouble.
On en retient un scénario complexe et bien construit : L’intrigue de « The Missing Heir » est l’un de ses points forts. Le jeu offre une histoire policière sophistiquée, avec des rebondissements et des révélations surprenantes. Les joueurs sont tenus en haleine jusqu’à la fin. L’écriture de Yoshio Sakamoto brille par sa capacité à créer des personnages intrigants et des situations complexes. Le jeu excelle aussi dans la création d’une ambiance immersive et distinctive. Les environnements détaillés, du sombre manoir aux rues animées de la ville, nous plongent dans le monde du jeu. La musique, composée par Kenji Yamamoto, ajoute une touche mystérieuse, accentuant les moments clés de l’histoire. « The Missing Heir » offre un gameplay équilibrant les dialogues, l’exploration et la résolution d’énigmes. Nous devons interroger les suspects, examiner les indices et résoudre des puzzles pour progresser dans l’enquête. Les interactions avec les personnages sont variées et influencent la direction de l’histoire, encourageant les joueurs à faire des déductions et à prendre des décisions.
L’un des principaux reproches que l’on peut faire au jeu est son rythme lent et inégal. Le jeu manque parfois d’un sentiment d’urgence, ce qui peut être parfois décourageant. Le gameplay de « The Missing Heir » suit un cheminement linéaire, avec des déclencheurs spécifiques pour progresser dans l’histoire. Cela signifie qu’on a peu de liberté dans notre approche de l’enquête.
Famicom Detective Club : The Girl Who Stands Behind (1989)
Suite directe de « The Missing Heir », « The Girl Who Stands Behind » poursuit l’histoire tout en introduisant de nouveaux mystères et un nouveau décor. Le joueur incarne à nouveau le détective amnésique, qui se retrouve cette fois-ci plongé dans une affaire de meurtre dans une école pour filles, un cadre unique qui ajoute une touche rafraîchissante à la série.
Une fois encore; le scénario de « The Girl Who Stands Behind » est une réussite, avec des personnages complexes et des motivations ambiguës. Les interactions entre les personnages sont particulièrement bien écrites, avec des dialogues percutants et des liens complexes. Le mystère central est bien construit et nous maintient en haleine avec des rebondissements et des révélations surprenantes.
Ce deuxième volet de la série apporte des améliorations au gameplay. Les énigmes sont mieux intégrées à l’histoire et les interactions avec les personnages sont plus naturelles et fluides. Les déclencheurs de progression sont moins arbitraires, offrant une expérience plus cohérente et immersive. Nous avons aussi plus de liberté dans l’exploration des lieux et l’interrogation des suspects. Le choix d’une école pour filles comme décor principal est une décision surtout pour l’époque et ça paie ! L’école, avec ses secrets et ses drames d’adolescents, offre un contraste intéressant avec le sombre manoir du premier jeu. Nous explorons les salles de classe, les dortoirs et les couloirs, découvrant les intrigues et les relations complexes entre les personnages.
Cela dit, « The Girl Who Stands Behind » est plus court que « The Missing Heir », ce qui peut être décevant. Bien que l’histoire soit bien rythmée, certains pourraient souhaiter une expérience plus longue (surtout qu’il n’y aura pas de suite… avant 30 ans !). Le jeu se concentre principalement sur l’école pour filles, ce qui limite la variété des environnements, ce qui mène à un petit sentiment de confinement par rapport au premier jeu, qui offrait une plus grande diversité de lieux à explorer. Si les énigmes sont mieux intégrées à l’histoire, certaines peuvent encore sembler obscures ou illogiques. On se retrouve parfois bloqués sur des puzzles abstraits ou des solutions contre-intuitives.
la série Famicom Detective Club, bien qu’ayant vécu dans l’ombre profondes d’autres franchises de Nintendo, a laissé une marque indélébile dans l’histoire du jeu d’aventure et d’enquête japonais. Avec ses intrigues complexes, ses personnages bien écrits et son immersion dans le monde des détectives, elle continue d’exercer une certaine fascination.
La série tente d’évoluer et de s’adapter aux nouvelles générations, comme en témoigne la sortie des récents remakes sur Switch, qui ont introduit ces classiques méconnus à un public à la fois moderne et occidental. Cet intérêt renouvelé a conduit à l’annonce du troisième volet, « Emio – L’homme au sourire », prévu pour le 29 août 2024, toujours sur Switch.
Cet épisode promet de plonger les joueurs dans une affaire mettant en scène l’urbaine légende du « Smiling Man », un tueur qui accorde à ses victimes « un sourire éternel ».
La série Famicom Detective Club, avec ses histoires intemporelles et son gameplay immersif, a quelque part su résister à l’épreuve du temps. Ce nouvel épisode est la preuve que cet univers est toujours prêt à accueillir une nouvelle génération de détectives virtuels. En attendant la sortie de ce troisième volet, les fans peuvent découvrir ces aventures classiques de « The Missing Heir » et « The Girl Who Stands Behind » sur Switch, histoire de se mettre en condition pour les nouveaux rebondissements et révélations que réserve « Emio ».
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